Dans une étude récente, E. Jammaers et A. Fleischmann dévoilent comment les microagressions capacitistes (discriminations basées sur le handicap) façonnent quotidiennement l’expérience professionnelle des personnes handicapées, révélant les racines structurelles profondes de ces interactions apparemment anodines.
Un tissu d’interactions quotidiennes
Chaque jour, des actes et des mots qui semblent insignifiants peuvent en réalité marginaliser et diminuer les personnes handicapées sur leurs lieux de travail. Ces microagressions, souvent involontaires, sont des gestes ou des paroles qui, par leur répétition, entretiennent une culture de l’exclusion. Les collègues peuvent, par exemple, exprimer admiration et pitié de manière déplacée, ce qui renforce le sentiment d’altérité et non d’appartenance des personnes handicapées.
L’empreinte sur l’estime de soi
Ces interactions, bien que subtiles, s’inscrivent dans la durée et façonnent l’identité professionnelle des individus affectés. Elles alimentent un cycle destructeur d’auto-évaluation négative, où les personnes handicapées peuvent venir à se percevoir comme moins compétentes et moins dignes de reconnaissance professionnelle. La prise de conscience de cette réalité affective et la résilience face à celle-ci deviennent alors des défis quotidiens pour les individus.
Barrières invisibles dans l’organisation
Les pratiques managériales et organisationnelles jouent un rôle clé dans la perpétuation des désavantages auxquels sont confrontées les personnes handicapées. Sans des ajustements adéquats et une véritable volonté de comprendre et de s’adapter aux besoins spécifiques, les organisations continuent de reproduire des environnements de travail qui ne valorisent pas tous les employés de manière égale. Le changement doit commencer par une réflexion profonde sur les structures en place et les attitudes qui les soutiennent.
Accessible dans son intégralité via ce lien, cet article souligne l’importance cruciale de reconnaître et de combattre les microagressions capacitistes comme un phénomène ancré dans les structures même du monde professionnel. Pour véritablement transformer les lieux de travail en espaces inclusifs, il est essentiel de remettre en question les normes et pratiques courantes et d’embrasser pleinement la diversité des expériences humaines. C’est seulement ainsi que nous pouvons espérer édifier un environnement professionnel véritablement équitable pour tous.
Points d’intérêt de l’étude sur les microagressions capacitistes au travail
- Impact des barrières environnementales et des interactions négatives : les chercheurs exposent comment les obstacles physiques et sociaux au sein des environnements de travail, ainsi que les interactions négatives avec les collègues, conduisent les personnes souffrant de handicaps, de maladies chroniques et de neurodivergences à intérioriser des sentiments d’insuffisance. Cette internalisation peut amener les individus à ériger eux-mêmes des barrières supplémentaires qui limitent leur intégration et leur épanouissement professionnel.
- Rôle des microagressions capacitistes : les microagressions, bien que souvent subtiles et non intentionnelles, telles que faire sentir à quelqu’un qu’il est un étranger, le rabaisser ou ignorer sa dignité et sa vie privée, jouent un rôle significatif dans le maintien de traitements inéquitables au travail. Ces comportements peuvent émaner des collègues, des superviseurs, ou d’autres personnes au sein de l’organisation.
- Importance de la reconnaissance et de l’action managériale : il est essentiel que les managers prennent conscience de ces comportements et agissent pour les adresser. Reconnaître et rectifier les microagressions capacitistes est crucial pour établir un environnement de travail plus inclusif, où tous les employés sont valorisés et respectés indépendamment de leurs particularités physiques ou mentales.
E. Jammaers et A. Fleischmann, les auteurs de cette étude, sont des chercheurs académiques spécialisés dans les questions de diversité, d’équité et d’inclusion dans les milieux professionnels. E. Jammaers est affilié à la Faculté d’économie de l’entreprise à l’Université de Hasselt, en Belgique, un établissement reconnu pour son engagement dans la recherche innovante sur le handicap et l’emploi. A. Fleischmann travaille pour l’initiative sur la diversité, l’équité et l’inclusion à l’Institut International pour le Développement du Management à Lausanne, en Suisse, où il contribue à développer des programmes et des recherches qui soutiennent l’inclusion dans les organisations à travers le monde. Leur collaboration apporte une perspective riche et multidisciplinaire à l’étude des microagressions capacitistes au travail, combinant des approches psychologiques, sociologiques et managériales pour offrir des insights profonds sur les défis rencontrés par les personnes handicapées dans les environnements professionnels.